Vil­la Do­lo­ro­sa

Aujourd’hui, c’est l’anniversaire d’Irina. Elle a 28, 29, 30 ans. Car entre les quatre murs de la Villa Dolorosa, plus ça change, plus c’est pareil.Irina se tâte entre la philosophie, la sociologie et la microbiologie. Olga pèse l’argent et la responsabilité. Macha hésite entre son mollasson mari Martin et le nouvel arrivé Georg. Quant à Andreï, le romancier raté, il dessine des guillemets dans l’air. Ensemble, elles amochent le vide en parlant, pour ne pas qu’il devienne trop évident. Et boivent beaucoup, beaucoup de vodka. Dans cette adaptation décontractée de Tchekhov, Rebekka Kricheldorf use généreusement de l’humour piquant et incisif qu’on lui connaît pour explorer nos attitudes contemporaines à l’égard du travail et du privilège. Sans verser tout à fait dans la satire, taquine mais pas moqueuse, l’auteure investit ses personnages d’une mélancolie touchante. Plébiscitées par le comité de lecture du POCHE, les trois sœurs – armées des mêmes plaintes, des mêmes blagues, des mêmes monologues, ou presque – reviennent découdre leurs privilèges le temps d’une soirée. À moins qu’elles ne décident de remettre ça à demain, ou plus tard, ou jamais… Mais en fait, tout cela, ne l’aurait-on pas déjà entendu ?

C’est une ronde, un dernier tour. Un TSCHÜSS qui revient toujours sur ses pas. Un revenir par les sentiers de flancs de coteaux. Il y a dix ans, le texte de Rebekka Kricheldorf ouvrait l’histoire de ce POCHE /GVE. On découvrait qu’une auteure, vivante, allemande, pouvait être drôle, très, et sombre, brillamment. Et marcher dans les répliques mélancoliques de Tchekhov. Pour finir en ouverture, Villa Dolorosa revient et c’est Manon Krüttli, artiste associée de 2019 à début 2023 et metteure en scène des plus âpres sommets qui sonnera le TCHAO d’une aventure sérieuse, vertigineuse, escarpée mais avant tout JOYEUSE. Et c’est avec les actrices de l’ENSEMBLE que nous dirons un dernier ADJEU qui claque !